| Médias, la pensée unique aux mains des multinationales vendredi 18 décembre 2009 , proposé par pelemail Les médias dominants « ne sont plus seulement des relais idéologiques de la mondialisation capitaliste, (mais) en sont eux-mêmes des acteurs de premier plan » (Serge Halimi) La concentration capitaliste dans les médias s’accroît au niveau mondial. Aux Etats-Unis, les règles de concentration dans l’audiovisuel ont été abolies en février 2002 ; AOL a racheté Netscape, Time, Warner Bros, CNN ; General Electric (1ère entreprise mondiale) a acheté le réseau NBC ; Microsoft domine le marché des logiciels et de la photo de presse par son agence Corbis ; News Corporation (Robert Murdoch) contrôle les principaux journaux américains et anglais The Times, The Sun, The New York post, possède un réseau de télévisions par satellite (BskyB), une chaîne américaine (Fox) et une des principales sociétés de production (20 Century Fox). On connaît la situation de monopole en Italie dans les chaînes de télévision (Berlusconi possède les trois principales chaînes privées et contrôle la télévision publique. En Espagne, Prisa contrôle El Païs, le réseau SER de radios, une chaîne cryptée et plusieurs maisons d’édition. Dans notre beau pays (voir tableau en annexe), cinq groupes principaux (Lagardère, Dassault et Bouygues qui prospèrent notamment grâce à des commandes publiques dans l’armement et le BTP..., plus Vivendi et Bertelsmann) se partagent l’essentiel des médias, qu’il s’agisse des télévisions, des radios, de la presse écrite, des livres, des musiques et des films. A ces cinq groupes il convient d’ajouter le groupe de distribution P.P.R (Pinault-Printemps-Redoute) qui contrôle la F.N.A.C et le fonds d’investissement Wendel-Investissement de notre baron Seillières, ci-devant président de l’UNICE (union des patrons européens) après avoir laissé la présidence du MEDEF, qui a raflé la deuxième place de l’édition de livres en France (après Lagardère) en mettant notamment la main sur une partie de l’édition scolaire ! (Nathan, Retz, Bordas, Le Robert..). D’une façon plus générale, la part des fonds d’investissement grandit dans le secteur des médias comme dans le reste de l’économie : ils contrôlent T.D.F (Télédiffusion De France), Eutelsat et la diffusion par câble, ils possèdent 22% de Bouygues, 25% de TF1, 37% de Lagardère et 45% de Vivendi... Pour être complets sur l’état de la concentration, il faut ajouter les innombrables liaisons entre les principaux groupes, tant au niveau des filiales communes et des participations croisées que des hommes. Ainsi Lagardère (34%) et Vivendi (66%) se partagent le réseau CanalSat (3,2 millions d’abonnés en juin 2005), Bertelsmann (34%) et Bouygues (66%) se partagent le réseau TPS (1,7 millions d’abonnés en juin 2005). Ainsi Lagardère vend à TF1 (Bouygues) des émissions de télévision et distribue dans ses magasins Virgin et Relay les livres, Cd et DVD du groupe TF1, à qui il vend également de la publicité pour le lancement de ses livres et magazines. Un autre exemple, au « Le Grand Jury » on rencontre les journalistes du Figaro (Dassault), de LCI (Bouygues) et de RTL (Bertelsmann) pour animer cette émission qui passe sur RTL et LCI et dont l’essentiel est publié le lendemain dans le Figaro. Il est pas beau notre monde...Quelques précisions : LA TELEVISION C’est sans doute le média le plus efficace pour le décervelage et la soumission : les français y passent en moyenne 3h24mn par jour (en 2004) et trois sur quatre regardent journellement TF1. Au début, il y avait une seule chaîne et une télévision d’Etat, la censure s’exerçait directement, mais il n’y avait pas de publicité et on pouvait y voir des créations de qualité, produites notamment par la SFP (société française de production (elle a été récemment bradée au groupe Bolloré). En 1968, s’en souvient-on, la publicité fut autorisée à la télévision pour 2 minutes par jour... En 1974, Giscard d’Estaing mettait fin au monopole de l’O.R.T.F et la publicité fut plafonnée à 25% du financement, plafond supprimé par...le PS en 1982. Les mêmes donnèrent en 1983 une « concession de service public » à une chaîne payante (Canal Plus), puis la 5 à Berlusconi en 1985 et TV6 (ancêtre de M6) à Publicis. La droite de retour vendit la première chaîne TF1 à un bétonneur (Bouygues) au nom du mieux-disant culturel ! Quant à la télévision publique, elle n’a de cesse de s’aligner sur les chaînes privées tant elle est sommée de fonctionner comme elle aux recettes publicitaires (la redevance en France est de 116 euros contre 184 en moyenne au niveau européen, 175 en Angleterre et 205 en Allemagne). Et, dans ce secteur comme dans tous les services publics, la frontière entre le public et le privé s’estompe, par exemple par la création de filiales communes, la privatisation des programmes (selon l’INA, les producteurs privés assurent 89,1% de la production audiovisuelle contre 39% en Allemagne et 32,7% en Angleterre) et le recours massif à l’intermittence. La multiplication des chaînes payantes (les « bouquets » par satellite !) n’a accru ni la qualité ni le pluralisme : CanalSat et TPS cumulent des centaines de chaînes et sont même en train de fusionner notamment pour faire face à la « concurrence » de l’internet haut débit (sur 9 millions d’abonnés, 500000 y regardent la télévision par l’ADSL). Et l’attribution de chaînes TNT (télévision numérique terrestre) n’a rien changé, plus des deux tiers ayant été attribuées aux groupes dominants Vivendi-CanalPlus (CanalPlus, itélé, CanalPlusCinéma, CanalPlusSport, Planète), Bouygues-TF1 (TF1, LCI, TMC, Eurosport, TPS Star, TF6), Bertelsmann-M6 (M6, W6, Paris Première, TPS Star, TF6) et Lagardère (Europe2télé, CanalJ, Gulliver) et le principal nouveau groupe entrant AB - « fast food de la télévision »- (NT1, AB1, TMC) est lié à TF1 par TMC et à Lagardère qui en assure la régie publicitaire. Les télévisions locales sont inexistantes ou contrôlées par les politiques locaux et les grands groupes qui s’y intéressent notamment depuis la loi de janvier 2004 qui y autorise la publicité pour la grande distribution et favorise la concentration. Ainsi TV Breizh (septembre 2000) est un poisson pilote des grands groupes (ici TF1) pour leur main mise sur le local. Le groupe France-Antilles (reste de l’empire Hersant qui fait dans la presse gratuite) s’est adjugé Télé Grenoble. Quant à Télé Toulouse et Télé Lyon Métropole, elles ont été crées après la loi du 13 décembre 1985 qui autorisait les télévisions locales commerciales grâce aux régies publicitaires de la Lyonnaise et de la Générale des eaux. LA PRESSE ECRITE Les quatre premiers groupes de presse écrite en France sont, dans l’ordre Dassault-Socpresse (CA 2004 : 1,45 milliards d’euros), Lagardère-Hachette ( CA mondial 2004 : 2,1 milliards dont 1 milliard en France), Ouest-France, groupe régional (CA 2004 : 953 millions d’euros) et Le Monde (CA 2004 : 639 millions, avec le Monde, Le Monde diplomatique, Le Monde des religions, Le Monde de l’éducation, Courrier International, Les cahiers du cinéma, Télérama, Midi Libre...) 1/ La 1)
1) presse quotidienne régionale La France est passée du 1er rang des lecteurs de quotidiens en 1914 au 26ème rang. Le nombre de quotidiens est passé de 242 en 1914 à 153 en 1945 et à 55 en 2005 (dont 33 quotidiens régionaux et 22 départementaux). Seuls ont échappé aux grands groupes le Républicain lorrain (Metz), le télégramme de Brest (Morlaix), l’Alsace (Mulhouse), La Marseillaise (Marseille et Montpellier) et l’Echo de Centre (Limoges). Le groupe France-Antilles a 12 quotidiens, Dassault-Socpresse 9 (en cours de vente), le groupe Sud-Ouest 5, le groupe Lagardère 4, de même que les groupes Est-Républicain et Centre-France, le groupe Dépêche du Midi et le groupe Le Monde 3 (dont Midi Libre et l’Indépendant). 2/ La presse nationale De la Libération reste encore le système de diffusion par des coopératives d’éditeurs qui permet l’accès aux services de l’une des messageries (NMPP, SAEMTP, MLP), mais sinon la situation est pire qu’en 1939. Ce sont les marchands d’armes Lagardère et Dassault qui tiennent l’essentiel de la presse d’information et de la presse magazine et le caractère nominatif des actions des sociétés de presse (article 4 de la loi du 1/8/86 reprenant les ordonnances de 1944) n’est plus assuré. Dassault contrôle Le Figaro et l’Express, Lagardère détient des parts significatives du Parisien-Aujourdhui et de l’Equipe (25%), du Monde (16%), de l’Humanité (9%) et du Nouvel Observateur. France-Soir a été repris par le fonds de placement Financière Hoche, Paris turf et Week-End par le fonds Montagu Private Equity, Le Point est contrôlé par le groupe P.P.R et Libération par Le groupe de Rothschild (37%). Un mot sur les journaux qui sont plus ou moins classés « à gauche » : • Le Monde : contrôlé à 100% par les associés fondateurs de 1944 à 1951, puis de façon partagée entre associés-fondateurs et société des personnels (et également société des lecteurs depuis 1985), le Monde a laissé entrer les « investisseurs » en 1986, leur part est passé de 8% alors à 37% en 1998. Il semble aussi que le dernier accord donne à Lagardère le contrôle de la régie de publicité du Monde. • L’Humanité : ce journal reste lié au parti communiste même s’il n’en est plus l’organe central et sa lecture, pendant le referendum sur la « constitution » européenne et depuis, est la seule dissonante parmi les journaux nationaux. Néanmoins, l’introduction de plusieurs groupes (Lagardère et TF1 notamment) pour 20% depuis mai 2001 ne peut rester longtemps sans conséquence pour un journal qui reste en grande difficulté financière. Saluons au passage le cynisme de Lagardère qui, pour étouffer le pluralisme (et sans doute aussi pour anticiper un éventuel retour du PC au gouvernement), utilise pour sa participation de 9% dans l’Humanité une société dénommée « Société Humanité Investissement Pluralisme »... 3/ Les gratuits Comme chez les anglo-saxons, les journaux « gratuits », entièrement financés par la publicité, se multiplient. Après les journaux d’annonces (réseau ParuVendu de France-Antilles qui a repris la Comareg - 220 éditions-, réseau du groupe Ouest-France -175 éditions-, réseau Villeplus de Lagardère et Dassault réunis), arrivent les affligeants premiers journaux d’ « information » censés parler aussi de l’actualité : Métro (34% Bouygues) et 20 Minutes. L’EDITION DE LIVRES Le choix se résume pour l’essentiel entre : • Lagardère-Hachette (1er éditeur de livres en France, 5ème au niveau mondial) avec Hachette, Larousse, Fayard, Mille et une nuits, Grasset, Calman-Lévy, Hatier, Hazan, Lattès, Le Masque, Marabout, Pluriel, Stock, Le Livre de poche, Armand Colin, Sedes, Dalloz, Dunod... • Et Seillères-De Wendel Investissement (2ème éditeur en France) avec Plon, Perrin, Orban, La Découverte, Robert-Laffont, Presses de la renaissance, Nathan, Le Robert, Retz, Bordas, Fleuve noir, 10-18, Pocket, Presses de la Cité, Belfond, Solar... D’autres multinationales interviennent (Bertelsmann, Atlas, Rizzoli, Reed-Elsevier, Média participations, Wolters-Kluwer) et il faut, ici comme ailleurs noter les participations croisées qui accroissent la concentration réelle du pouvoir. Ainsi J’ai Lu-Librio est détenu à 35 % par Lagardère, à 65% par Flammarion (lui-même détenu par Rizzoli) ; Flammarion détient 18% des P.U.F et 23% d’Actes Sud. LA DISTRIBUTION (livres, musique, films) Pour les livres, il faut également signaler que pour le groupe Lagardère, sa domination dans l’édition est renforcée par sa présence considérable dans la distribution et la commercialisation : librairies Virgin et Relay (deuxième libraire de France), presse magazine, presse régionale, radios, télévision... Pour la musique et le cinéma, le marché est partagé entre : . Bouygues-TF1 (filiales TF1 Vidéo et TF1 Films Production, participation de 49% dans Téléma et 50% dans Film par Film partagé avec Disney) . Vivendi-CanalPlus (Universal Music distribue ¼ des albums vendus dans le monde, production et distribution de films, Canal plus possède le troisième catalogue mondial de films) . Bertelsmann pour la musique (1/5 des disques vendus dans le monde par sa filiale commune avec Sony, BMG-Sony). Source : Sur la concentration dans les médias, Observatoire Français des Médias, édition Liris 2005 |