• Cercle bolivarien de Paris, loi association 1901

    http://www.cbparis.org/2016/02/la-droite-venezuelienne-dans-tous-ses-etats.html?utm_source=_ob_email&utm_medium=_ob_notification&utm_campaign=_ob_pushmail

    Ce que la droite et l’extrême-droite vénézuéliennes n’obtiennent pas par les urnes, elles tentent, depuis 2002 et le coup d’Etat avorté contre Hugo Chávez, de l’obtenir par la force. Ainsi, quand, le 13 avril 2013, le « Bolivarien » Nicolás Maduro est élu président de la République, son adversaire malheureux, Henrique Capriles Radonski, appelle les partisans de sa coalition, la Table de l’unité démocratique (MUD), à exprimer leur arrechera (rage, haine, violence) dans la rue. Ce nihilisme radical provoquera la mort de neuf « chavistes » et fera des dizaines de blessés.

    Nouvelle désillusion, fin 2013, pour l’opposition : elle perd les élections régionales et municipales, dont elle avait voulu faire un plébiscite contre le président Maduro. Le 23 janvier 2014 – date symbolique et en rien anodine, car celle du renversement, en 1958, du dictateur Pérez Jiménez –, Leopoldo López, l’un des dirigeants « ultras » de la MUD (avec Antonio Ledezma et María Corina Machado), convoque ses militants et sympathisants à mettre en œuvre le plan « la salida » (la sortie) destiné, en créant le chaos, à pousser le chef de l’Etat à la démission. Dès le 12 février, sous les exhortations de ces meneurs, de rares manifestations pacifiques et, surtout, d’incessantes actions de guérilla urbaine mettent le feu à quelques villes du pays – toutes entre les mains de maires d’opposition. Sous le vocable générique de guarimbas (barricades faites de tout type de matériel et de pneus enflammés), cette vague de violences sauvages va laisser dans son sillage le lourd bilan de 43 morts (dont neuf fonctionnaires des forces de l’ordre) et 878 blessés.

    C’est la voix empreinte d’une profonde amertume que Germán Oscar Guerrero raconte ce qu’il a vécu à cette époque. « Je conduisais un camion de médicaments dans l’Etat du Táchira, en direction de l’hôpital central de San Cristobal, quand des encapuchados [hommes cagoulés] m’ont intercepté. Ils ont tiré des miguelitos [câbles garnis de clous] qui ont crevé les pneus du véhicule et se sont dirigés vers moi avec l’intention de le brûler. Je leur criais qu’il s’agissait de médicaments, mais, du seul fait que je conduise un véhicule officiel, ils braillaient qu’ils allaient me tuer… » Dans cette partie du Venezuela qui jouxte la frontière colombienne, ce type de menace n’a rien d’une plaisanterie. Les « manifestants » lancent en direction de Guerrero plusieurs projectiles dont une papita – engin qui ressemble à une pomme de terre dans un papier d’aluminium, mais est composé d’explosif C-4 et de clous. Pour se protéger le visage, Guerrero l’intercepte avec la main droite au moment où elle explose. Jamais plus il ne sera le même, jamais plus il ne pourra réutiliser sa main : il a survécu, mais il a fallu l’amputer.

    Desirée Cabrera, elle, est la mère d’une petite fille de dix-huit mois. Avec quatre-vingt-huit autres bébés âgés de six mois à trois ans, cette dernière se trouvait dans la crèche du ministère du logement lorsque celui-ci, le 1er avril, a été attaqué par une horde à l’aide de cocktails molotov et de bouteilles d’essence qui ont provoqué un incendie mettant en grand danger la vie des enfants. « Durant quarante-cinq jours de guarimbas, raconte Mme Cabrera, ils se sont acharnés dans cette zone sur le ministère des transports, l’Ecole de la magistrature, etc. Tout en déposant un recurso de amparo [1] pour demander la protection des enfants, les mères ont démontré que la police municipale de Chacao [quartier chic de Caracas] du maire d’opposition Ramón Muchacho laissait délibérément faire les manifestants. »

    M. Guerrero et Mme Cabrera faisaient partie d’une délégation du Comité des victimes des guarimbas présente à Paris les 26 et 28 janvier 2016 dans le cadre d’une tournée européenne d’information. Ce comité, qui regroupe les représentants de 19 morts et de 195 blessés non membres de l’opposition, entend expliquer le contexte politique, économique et social dans lequel ces faits de violence se sont déroulés et, surtout, nous précise en janvier María Eugenia Rosa, qui l’accompagne dans sa tournée, « rendre visible les victimes occultées ».

    En Amérique latine, le type et les modalités des opérations insurrectionnelles menées au Venezuela début 2014 ne laissent aucun doute. Dès le 7 mars de cette année-là, au nom de l’Union des nations sud-américaines (Unasur), la présidente chilienne Michelle Bachelet, dont le pays a été à bonne (et sinistre) école, déclarait : « Nous n’appuierons jamais un mouvement qui refuse le résultat des élections et cherche à renverser par la violence un gouvernement élu librement et démocratiquement. » Toutefois, cette voix de femme, chef d’Etat, progressiste, ne fut guère écoutée. « La droite a eu l’opportunité de monter un lobby médiatique en Europe et celui-ci n’a rapporté que sa version », s’insurge à Paris Nora Delgado, récemment élue députée de l’Etat de Miranda pour le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV). De fait, ayant érigé depuis longtemps la critique et la condamnation de la Révolution bolivarienne en postures de principe, le grand cirque de ce que l’on nomme complaisamment la « presse libre et indépendante » n’a développé – et avec quelle vigueur ! – que la seule thèse de la droite et de l’extrême-droite vénézuéliennes : un mouvement pacifique composé de « la société civile » et d’ « étudiants » a été impitoyablement réprimé par un pouvoir aux abois.

    Une hostilité et une désinformation totales, mille fois dénoncées. Mais qui prennent un relief particulier et provoquent un malaise certain lorsqu’elles émanent d’une organisation non gouvernementale unanimement respectée : Amnesty International.

    Dans son numéro de décembre 2015, c’est sous le titre « Venezuela : scènes de la torture ordinaire », que La Chronique d’Amnesty, mensuel de la section française de l’ONG, livre un article de quatre pages totalement à charge, signé es qualités - ce qui lui donne un poids supplémentaire - par la présidente de cette section, Geneviève Garrigos. Cette dernière a interviewé à Caracas trois femmes qui, arrêtées par les forces de l’ordre lors des manifestations, déclarent (à l’évidence avec raison) avoir été victimes de tortures et de brutalités. Toutefois, d’emblée, ce qu’on appelle le « chapô » (court résumé situé en tête d’article) donne à l’ensemble un ton très particulier : « Des manifestations contre les pénuries, l’inflation et l’insécurité ont ébranlé le pays en 2014 ». Un peu court, nous permettra-t-on d’objecter. Et la déstabilisation d’un président démocratiquement élu ? Jamais, tout au long du texte, il ne sera question de la salida. Les guarimbas  ? Ce mot n’apparaît pas non plus. Au terme de l’article, le militant ou le lecteur de La Chronique n’aura pour seule information - confirmant ce qu’il a lu mille fois dans la presse commerciale - que « des milliers de personnes [par définition pacifiques] ont été arrêtées et brutalisées ».
    « Le rôle d’Amnesty n’est pas de contextualiser, nous précise Geneviève Garrigos, lors d’un entretien franc et courtois tenu le 1er février 2016. Moi, je ne suis pas journaliste, pas historienne, je ne fais que raconter les événements dont Amnesty témoigne. La contextualisation c’est à vous, journalistes, de l’effectuer. Moi, je suis pour la défense des droits humains »

    Replaçons donc les événements dans leur contexte puisque ce rôle nous est attribué (et que nous sommes également sensible à la défense des droits humains) [2]. « Le bilan est implacable, écrit La Chronique  : 43 personnes ont perdu la vie dont huit [en réalité neuf] représentants de l’Etat ; 878 ont été blessées, dont près de 300 membres des forces de sécurité (…). » Il ne serait pas forcément inutile de préciser que les policiers et gardes nationaux abattus l’ont été par balles (ainsi que nombre de leurs blessés), ce qui relativiserait la nature supposée « pacifique » des affrontements ; que parmi les autres personnes décédées (plus de vingt par armes à feu), la majorité n’appartenait pas à l’opposition : sept ont perdu la vie du fait des pièges mortels installés par les manifestants (dont trois motards décapités par des câbles métalliques tendus en travers de la voie publique), neuf en tentant de franchir une barricade ou de dégager les rues.

    Par ailleurs, note María Eugenia Rosa lors de la visite du comité, « seuls six morts sont la conséquence directe d’une réaction disproportionnée d’effectifs militaires. Les responsables de ces excès sont privés de liberté ». La Chronique le mentionne en effet brièvement : trente policiers ont été inculpés, dont trois ont été reconnus coupables, quatorze placés en détention et douze en liberté conditionnelle.

    « Je vais vous dire une chose, nous répond Mme Garrigos un peu gênée lorsque nous évoquons l’ensemble de ces précisions, j’ai repris les chiffres que donne le rapport d’Amnesty, ce sont les seuls que j’avais… » Exact. Dans la cinquantaine de pages rendue publique le 24 mars 2015 – « Les visages de l’impunité : un an après les protestations de la rue, les victimes attendent toujours justice » –, les « chercheurs » d’Amnesty en charge de l’Amérique latine, basés à Londres [3], ne précisent ni les « détails » susmentionnés ni la tentative de déstabilisation du pouvoir et tranchent de façon lapidaire : « La vague de protestations de 2014 démontre que le gouvernement vénézuélien ne tolère ni la dissidence ni les manifestations critiques à l’égard des politiques gouvernementales. » L’analyse objective des faits montrant clairement la partialité de cette analyse, on en arrive à une conclusion particulièrement dérangeante : soit les « chercheurs » d’Amnesty ont pris fait et cause pour la droite et l’extrême-droite vénézuéliennes, soit ils sont incompétents.

    « Attendez ! réagit Mme Garrigos (qu’on ne peut rendre responsable des éventuelles erreurs ou turpitudes des analystes londoniens de son organisation)… Moi, je ne suis pas en train de faire de la politique ou de la géopolitique, je raconte l’histoire, à travers leurs témoignages, de trois femmes brutalisées et torturées après leur arrestation. Je les ai rencontrées. Aucun contexte ne peut excuser les violences qu’elles ont subies. » Voilà au moins un point d’accord. Où qu’elle se produise, la torture (tout comme l’usage excessif de la force) doit être combattue et Amnesty est parfaitement dans son rôle en la dénonçant. La règle ne souffre aucune dérogation.
    Mais pourquoi appliquer deux poids et deux mesures dans les accusations ? Les 5 et 6 mars 2015, une première délégation du Comité des victimes des guarimbas, au sein de laquelle figurait Luís Durán – père d’Elvis Duran, motard décapité le 21 février 2014 par un câble d’acier tendu en travers d’une avenue de Caracas – a visité Paris, Bruxelles et Madrid. Reçue par les sections belge et espagnole d’Amnesty, elle ne l’a pas été par la section française. « Il s’agit sans doute d’un concours de circonstances, réagit Mme Garrigos, invoquant la possible désorganisation, à ce moment, d’une association qui, c’est vrai, à ce niveau, repose sur le bénévolat ; je n’étais pas au courant, sinon, je les aurais reçus. » Dont acte. Mais alors, pourquoi ne pas avoir rencontré leurs représentants à Caracas ? Pourquoi ne pas y avoir recueilli, par exemple, le témoignage de M. Guerrero, aussi traumatisé par ce qu’il a vécu que les femmes présentées dans La Chronique  ? Conducteur de camion, il ne peut plus travailler après la perte de sa main et, en outre, pour avoir dénoncé les faits et l’opposition à la radio et la télévision vénézuéliennes, il a dû fuir le Táchira et en évacuer ses enfants du fait des menaces reçues. « Je ne prétends absolument pas qu’il y a des bonnes et des mauvaises victimes, mais, pour moi, l’équilibre ce n’est pas de dire, voilà, il y a une victime du gouvernement et une victime de l’opposition, je ne suis pas là-dedans. Je raconte trois histoires. Ce que je cherche à montrer c’est ce qui a été fait à ces femmes, point. »

    On se trouve là face à une contradiction évidente, fût-elle exprimée de bonne foi. Le fond de l’explication viendra un peu plus tard. « J’aurais pu rencontrer d’autres victimes et en parler, reprend en effet la présidente de la section française, pressée par nos questions, mais je n’ai pas vu celles qui sont venues à Paris, ce qui n’était pas un refus, et, à Caracas, ce ne sont pas les gens qu’on m’a fait rencontrer [c’est nous qui soulignons]…  » Qui donc a servi d’intermédiaire pour cette prise de contact ? La section vénézuélienne d’Amnesty ! Un coin de voile se soulève. Interviewé dans le cadre d’un précédent dossier de La Chronique (avril 2013) consacré au Venezuela, le président de cette section, Marcos Gómez, y a fait cette description ahurissante de son pays : « Dans les années 1970 et 1980, le contexte politique est relativement calme (…) Dans ces années-là, le Venezuela a des indices très faibles en matière de violation des droits humains. Le pays se classe parmi les vingt pays les plus pacifiques du monde, c’est une sorte de Suisse sud-américaine (…) Aujourd’hui, le contexte est radicalement différent [4].  »

    Ce n’est plus Amnesty International, c’est Amnésie internationale ! Pendant la période évoquée, le Venezuela ressemblait tellement à la Suisse que, jusqu’en 1979, une guérilla y a été active. Pas une manifestation, alors, qui ne se termine sans cadavres. Une ambiance de massacres, de règlements de comptes permanents. Sur les conseils de la Central Intelligence Agency (CIA) et du Département d’Etat américain, le gouvernement vénézuélien a confié ses services de renseignements à un groupe de Cubains (anticastristes). Le terroriste Luis Posada Carriles devient instructeur de la Direction générale de la police (Digepol), le corps répressif des délits politiques [5]. Il y introduit les méthodes standard de la CIA.

    Lorsque la Digepol change de nom et devient la Direction des services de renseignement et de prévention (Disip), c’est lui qui organise la transition. La nuit, opérations de ratissage, élimination systématique des militants de gauche trop remuants. Des centaines de détenus politiques pourrissent dans les prisons du Cuartel San Carlos, dans l’île del Burro, dans la prison Modelo, dans celles de Trujillo, de Ciudad Bolívar, de Cachipo ou d’El Tocuyo. Dans les geôles de los Chaguaramos, les Cubanos combattent les « ennemis de la démocratie ». Dit autrement : ils soumettent les « subversifs » à la question.

    Quant aux années 1980, sur fond d’abyssales inégalités sociales, elles se terminent par la terrible répression du soulèvement populaire du 27 février 1989, dû à la l’extrême paupérisation de 60 % de la population et demeuré dans l’Histoire sous le nom de caracazo  : 276 morts officiellement, de l’ordre de 3 000 morts et disparus d’après nombre d’historiens. Vous avez dit la Suisse, M. Gómez ?

    Plus récemment, le 25 novembre 2015, au cours d’un meeting électoral organisé à quelques jours des élections législatives du 6 décembre, un responsable du parti d’opposition Action démocratique (membre de la MUD), Luis Manuel Díaz, est abattu. Les dirigeants de l’opposition accusent immédiatement des militants du Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV). La presse nationale et internationale se déchaîne sur le thème de l’assassinat politique et pointe du doigt le gouvernement. Dans un communiqué d’Amnesty (disponible sur le site de la section belge) publié dès le lendemain du crime, on peut lire : « L’homicide de Luis Manuel Díaz dresse un tableau effrayant de la situation des droits humains au Venezuela (…) a déclaré Marcos Gómez, directeur d’Amnesty International Venezuela ». Un peu plus loin, le communiqué précise : « Des candidats de l’opposition et des défenseurs des droits humains ont signalé d’autres agressions et actes d’intimidation dans le cadre de la campagne électorale [6].  » Titre du communiqué : « Venezuela. Les opposants politiques ont droit à la sécurité ». On ne peut être plus clair quant à la désignation des potentiels auteurs du crime. Seulement, l’enquête révélera très rapidement que Díaz, assassiné dans le cadre d’un règlement de comptes, était à la tête d’une bande de délinquants. Aucun dirigeant de l’opposition n’assistera à ses obsèques. Aucun de ceux qui ont mis les « chavistes » en cause, pas plus M. Gómez que les faussaires médiatiques, ne rétablira la véracité des faits.

    En bref, appartenant sociologiquement à une classe moyenne planétaire, connectée, plus ou moins libre de vivre la vie qui lui plaît, le président de la section vénézuélienne d’Amnesty International a implicitement et explicitement pris partie pour l’opposition et contre cette révolution qui a fait des plus pauvres sa priorité. Quel est son rôle dans l’élaboration du rapport des « chercheurs » londoniens nous l’ignorons. Mais dans la visite guidée et l’article de Mme Garrigos, il apparaît évident.

    Au plus fort des violences de 2014, un groupe de défenseurs vénézuéliens des droits humains (dont d’anciens membres de la section vénézuélienne d’Amnesty), tout en exigeant des pouvoirs publics « la poursuite des enquêtes sur toutes les dénonciations » et en rejetant « de la manière la plus ferme les actions contraires aux droits de l’homme de la part des corps de sécurité », se prononçait ainsi : « Nous condamnons la manipulation que des médias nationaux et internationaux, ainsi que certaines organisations d’une “société civile” auto-proclamée ont faite de la situation, en présentant une image faussée et sans scrupules de la réalité nationale, qui encourage la violence et rend invisibles certains des acteurs du conflit. Et nous encourageons la communauté internationale, et en particulier les organisations des droits humains, à recouper et à vérifier avec soin les informations qui circulent sur le Venezuela [7 ».

    Dans l’article de La Chronique censé ne pas remettre les événements dans leur contexte, on apprend néanmoins que « dehors, des femmes font la queue devant un supermarché pour en sortir avec des sacs de rouleaux de papier hygiénique », que « demain ce sera [pour] du savon ou du lait maternisé » et qu’il y a « des pénuries ». En revanche à aucun moment la déstabilisation économique dont est victime le Venezuela ne sera évoquée. Pour les jeunes générations, qui n’ont pas connu cette époque et ont donc quelques excuses lorsqu’ils se font « balader », et pour les plus anciens, qui ont semble-t-il perdu la mémoire, on rappellera ici que, en 1972 et 1973, après que le président américain Richard Nixon ait donné l’ordre de « faire crier » l’économie du Chili de Salvador Allende, toutes les denrées alimentaires et les biens de consommation courante y faisaient l’objet de pénuries. Que certains produits comme la viande, le pain, le sucre, l’huile et… le papier hygiénique (ah, le manque de papier hygiénique à Caracas, qui n’en a entendu parler ?) étaient indisponibles pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, tandis qu’un marché noir se développait, sur lequel les prix étaient parfois dix fois supérieurs au prix officiel. Vous avez dit Chili, ou Venezuela, ou… les deux ? Après tout, Mme Garrigos aurait aussi bien pu « non-contextualiser » en notant que plus d’un million de logements sociaux ont été attribués par le gouvernement aux défavorisés en un peu plus de trois ans…

    On ne s’étendra pas sur le silence total quant à la participation de paramilitaires colombiens, dans le Táchira, à cette tentative de renversement du gouvernement bolivarien. On passera aussi rapidement sur la criminalisation des « collectifs armés » ou « collectifs de motards chavistes » systématiquement présentés comme les « groupes paramilitaires de Maduro »… Il s’agit là d’un grand classique, au même titre que les « cercles de la terreur » – les très socialement impliqués cercles bolivariens –, cauchemar en 2002 d’une classe moyenne vénézuélienne lobotomisée par les médias [8].

    Un dernier point, concernant Amnesty International en général, retiendra ici notre attention. Lors du décès, en France, de Rémi Fraisse, qui manifestait contre le projet de barrage de Sivens, le communiqué londonien de l’ONG – « La justice doit faire toute la lumière sur le décès de Rémi Fraisse » (3 décembre 2014) – précisait ceci : « Les responsables de l’application des lois sont parfois contraints de recourir à la force dans l’exercice de leurs fonctions (…) Amnesty International reconnaît que la tâche de ces responsables est difficile et dangereuse et que, en France, la majorité d’entre eux s’acquittent de leurs fonctions de manière professionnelle, dans le respect de la loi. » Une fois admis que des cas de torture n’entrent pas dans ce cadre, pourquoi ce constat exprimé dès qu’il s’agit de policiers européens, non réellement mis en danger à Sivens, ne s’applique-t-il pas aux forces de l’ordre vénézuéliennes confrontées, elles, dans des affrontements d’une toute autre nature, à des armes de guerre ? Mansuétude relative pour le Nord, inflexibilité totale pour le Sud : sous le rideau de fumée « humanitaire », on retrouve là une grande constante des rapports internationaux.

    Qu’on ne s’y trompe pas. Il ne s’agit pas ici d’accabler Amnesty International, ni sa section française, ni la présidente de cette dernière, ni La Chronique, qui ont, par ailleurs, d’autres mérites. Il ne s’agit pas non plus de polémiquer pour le plaisir de polémiquer, mais de tenter de comprendre comment fonctionnent les mécanismes de l’information et de la… désinformation. Car, en la matière, le serpent se mord la queue. Déjà fondamentalement hostiles aux gouvernements progressistes d’Amérique latine, et en particulier à celui du Venezuela, les experts, consultants et oracles médiatiques font évidemment leur miel des rapports d’Amnesty, lesquels, confortant la vulgate dominante et permettant de transformer le Venezuela en Etat paria, sont immédiatement reproduits [9]. Et crédibilisent ensuite les analyses les plus tordues, les mensonges les plus éhontés.

    Cette deuxième visite en Europe du Comité des victimes des guarimbas n’est pas intervenue par hasard. Avec le système électoral qu’elle a systématiquement rejeté, dénoncé et diabolisé ces quinze dernières années, dès lors qu’elle avait perdu, l’opposition a obtenu une large majorité à l’Assemblée lors des élections du 6 décembre 2015. Elle s’est donnée deux objectifs prioritaires. Le premier : chasser Nicolás Maduro de la présidence en six mois. De façon démocratique ? Nul ne le parierait, l’option du référendum révocatoire, permis par la Constitution, paraissant écartée car il ne peut assurer la victoire. Le second : voter, le plus rapidement possible une loi d’amnistie destinée à libérer les « prisonniers politiques ». Le plus connu d’entre eux, Leopoldo López, a été condamné à treize ans et six mois d’incarcération pour avoir déclenché les guarimbas (il avait déjà participé à la tentative de coup d’Etat d’avril 2002). La Cour interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH), Amnesty International, Human Rights Watch (très lié au Département d’Etat américain) et d’autres groupes internationaux dits « de défense des droits humains » ont condamné son arrestation. De même que celle du maire de San Cristobal, Daniel Ceballos, qui a ouvertement appelé à la salida » et a participé aux guarimbas. Un détail : la papita qui, dans cette ville, a emporté la main de Germán Guerrero, était composée de C-4, un explosif à usage militaire que les étudiants (d’une manière générale !) ne savent ni agencer ni utiliser ; mais que, en revanche, les paramilitaires colombiens manient avec habileté.
    « L’amnistie ça serait un sacrilège pour nous, s’indigne Guerrero ! On a voulu nous rendre invisibles, on n’existe pas. Et les auteurs se présentent comme les victimes. Ce ne sont pas des prisonniers politiques, ce sont des personnes qui ont provoqué un désastre, qui ont appelé à la destruction et à la mort ».

    Il y a en effet quelque chose qui cloche dans cette affaire. La proposition de loi d’amnistie et de réconciliation nationale présenté par la MUD à l’Assemblée va bien au-delà des événements de ces deux dernières années (ce qui, en soi, poserait déjà problème). Dans le but affiché de « refermer les blessures politiques ou sociales qui nuisent à la vie commune » et de « créer les conditions propices à la participation de tous les secteurs aux affaires publiques », elle prétend ni plus ni moins que d’amnistier tous les faits de violence, crimes et délits à caractère politique (et économique) commis du… 11 avril 2002 au 31 décembre 2015. Y compris, d’après son article 4, l’incitation à la désobéissance aux lois et l’incitation à la haine (nous n’inventons rien !) ; la violence ou la résistance à l’autorité ; la création de panique dans la collectivité par la diffusion de fausses nouvelles ; les dommages aux systèmes de transport, aux services publics, informatiques ou de communication ; l’importation, la fabrication, le port, la fourniture et l’utilisation d’engins explosifs et incendiaires ; l’utilisation de mineurs dans la commission de délits ; l’insubordination, la rébellion civile, la trahison de la patrie, la rébellion militaire, le soulèvement, la révélation de secrets militaires ; le port et l’usage illicites d’arme à feu [10]. « Ils reconnaissent qu’ils ont fait tout ça », a pu s’exclamer l’ex-président de l’Assemblée nationale et aujourd’hui député du PSUV Diosdado Cabello. Curieux démocrates, effectivement, que ces gens-là…

    Effacées les peines des policiers assassins du coup d’Etat de 2002 et les poursuites contre ses auteurs intellectuels – dont Pedro Carmona, président putschiste pendant quelques heures, actuellement exilé en Colombie, ou le pseudo syndicaliste Carlos Ortega, en fuite au Pérou. Pardonnés les instigateurs de la déstabilisation économique de décembre 2002 – janvier 2003. Jusqu’aux banquiers corrompus et en fuite peuvent se préparer à rentrer au pays. Les sicarios assassins de plus de 130 paysans tombés dans le cadre de la mise en application de la réforme agraire seront-ils également absous ?

    Problème : « D’après les lois internationales, remarque à Paris María Eugenia Rosa, une amnistie ne peut être promue par les auteurs des crimes et délits considérés. » D’ores et déjà, le président Maduro a annoncé qu’il ne signera pas cette loi d’amnistie. Depuis un certain temps, il a proposé la création d’une Commission pour la justice et la vérité, destinée à enquêter sur tous les cas de violences commis en 2014, quels que soient les acteurs impliqués. Faut-il préciser que la MUD ne veut pas en entendre parler ? Le conflit s’avère donc inévitable entre le législatif et l’exécutif. Que feront les organisations de défense des droits humains ? Approuveront-elles, toutes choses égales par ailleurs, une « loi du point final » vénézuélienne, similaire à celle élaborée en leur temps par le général Augusto Pinochet ou les militaires argentins ?

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    Notes

    [1] L’amparo, qui signifie « protection », est un recours juridique déposé face à un acte illégal ou abusif qui restreint, supprime ou menace les droits consacrés par la Constitution.

    [2] Pour information, l’auteur de cet article a été rédacteur en chef de La Chronique d’Amnesty d’août 1993 à janvier 1997 et a quitté cette organisation, en excellents termes, pour rejoindre l’équipe du Monde diplomatique. Qu’on ne cherche donc quelque arrière-pensée hostile que ce soit dans ce débat.

    [3] Les sections nationales ne font théoriquement que reprendre et diffuser les informations reçues du siège londonien, les seules qui font foi.

    [4] Propos recueillis par Pierre-Philippe Berson, « L’extrême polarisation est le principal problème », La Chronique, avril 2013.

    [5] De Caracas, Luis Posada Carriles commanditera en 1976 la pose de deux bombes dans le vol CU 455 de la Cubana de Aviación. L’appareil explosera en décollant de La Barbade, le 6 octobre. Bilan : soixante-treize morts.

    [6] http://www.amnesty.be/venezuela-l-homicide-d-un-politicien-de

    [7] Lire « Les militants vénézuéliens d’ONG indépendantes des droits humains répondent aux médias internationaux », VenezuelaInfos, Caracas, 2 mars 2014.

    [8] Lire « Les “colectivos” vénézuéliens, du fantasme à la réalité », Mémoire des luttes, 28 juillet 2014.

    [9] Entre autres : Paulo Paranagua, « Amnesty critique la réduction de l’espace démocratique au Venezuela » ; « Amnesty International passe au crible le Venezuela », Le Monde, respectivement 25 février et 24 mars 2015.

    [10] http://www.asambleanacional.gob.ve/doc_ed81a6f2079a4d3aeaa5.pdf

    http://www.medelu.org/Bonnes-et-mauvaises-victimes-au

     


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    Voir aussi :

    Décryptage de la propagandeoccidentale depuis Damas par Ayssar Midani

    Syrie : La bataille d’Alep et les mensonges de nos journalistes aux ordres

    Syrie : La bataille d’Alep et les mensonges de nos journalistes aux ordres

    L’accumulation des mensonges éhontés par lesquels les journalistes de nos principales chaines télé et de nos grands journaux nous racontent les actuelles opérations militaires en Syrie – qui pourraient marquer un virage majeur dans le cours de cette guerre qui ensanglante le pays depuis cinq ans – est véritablement indigne et scandaleuse. Un sommet a été atteint récemment avec la description faite de la bataille d’Alep.

    La grande ville industrielle située au nord de la Syrie a toujours été la capitale économique du pays. En 2012, Alep a été attaquée par des groupes djihadistes de diverses tendances, en grande partie constitués de djihadistes et de mercenaires étrangers, qui ont réussi à l’encercler presque complètement, à occuper certains quartiers périphériques où se trouvent différentes usines et centrales électriques et hydrauliques, et à s’infiltrer dans plusieurs quartiers du centre-ville. Les habitants n’ont absolument pas collaboré à l’attaque, et en ont subi au contraire toutes les conséquences. En fait, les usines ont été démantelées par les djihadistes, lesquels reçoivent continuellement des renforts…  et des armes en provenance de la Turquie toute proche. Les équipements des usines ont tous été revendus en Turquie, avec évidemment la complicité des autorités d’Ankara.

    Mais face à la résistance opposée par la ville, rendue possible par d’incertaines voies de ravitaillement au sud-est du centre-ville maintenues ouvertes tant bien que mal par l’armée, les djihadistes, appuyés par des miliciens de l’État islamique (EI) aussi appelé Daesh provenant de l’Est, de Raqqa, ont décidé de couper l’eau et l’électricité aux assiégés tout en bombardant les quartiers du centre-ville à l’aide de mortiers, et en harcelant les habitants par des attentats sanglants menés à l’aide – entre autres – de voitures piégées (le plus meurtrier a touché l’université et provoqué a mort de dizaines d’étudiants). Sur l’ensemble de ces faits, nous avons les témoignages répétés des évêques des communautés chrétiennes d’Alep, qui racontent également avoir fait creuser des puits pour essayer de soulager les souffrances de la population assoiffée, des témoignages que les journalistes ne pouvaient pas ignorer, même s’ils n’avaient pas forcément envie de faire confiance aux informations détaillées fournies par l’agence syrienne SANA ou par les différentes sources russes (Sputnik) ou libanaises (Al-Manar).

    Carte_Syrie1La contre-offensive de l’armée arabe syrienne déclenchée au cours des derniers mois de 2015 avec l’appui de l’aviation russe vise avant tout à « mettre fin » au siège de la ville. L’armée a donc progressé « depuis le centre-ville vers les localités voisines » pour éloigner les assaillants. Au nord-est, elle a libéré la grande base militaire de Kuweiri, située à presque 25 km du centre et assiégée depuis plus de trois ans, en repoussant les miliciens de Daesh vers l’Euphrate. Au nord-ouest, deux autres villes situées à 40 km d’Alep ont également été libérées, elles étaient assiégées depuis 2012 par les djihadistes d’Al-Nosra (branche syrienne d’al-Qaïda) et leurs alliés d’Harar al-Sham et de l’Armée syrienne libre (ASL). L’agence SANA a diffusé les images des foules en liesse accueillant l’armée « libératrice ». Et vers le sud-ouest également, l’armée avance pour rouvrir les routes vers les provinces d’Homs et de Hama, et permettre un meilleur afflux de ravitaillement de la population en biens de première nécessité.

    Mais voilà, les mots utilisés par nos journalistes aux ordres disent exactement le contraire de la réalité, pour leur plus grande honte. D’après eux (et selon les directives qu’ils reçoivent), ce serait l’armée nationale qui « avancerait vers Alep » pour la « reconquérir« , comme si la ville était aux mains des rebelles et des mercenaires étrangers, et non assiégée depuis plus de trois ans par les djihadistes. Selon eux, les habitants d’Alep fuiraient la ville, terrorisés par les bombardements russes.

    En réalité, à l’intérieur du périmètre d’Alep,  il n’y a plus de combats. Les groupes de djihadistes et de mercenaires qui s’étaient infiltrés en ville ont été isolés et ont comme seule perspective celle de se rendre ou bien de conclure un accord avec le gouvernement comme celui qui a permis aux djihadistes encerclés dans un quartier isolé de Homs d’être accompagnés à la frontière turque dans des autobus fournis par le gouvernement.

    Le front se trouve désormais beaucoup plus au nord d’Alep, à seulement 20 km de la frontière turque (information du 7 février). L’armée nationale entend bien atteindre la ville frontalière d’A’zaz pour bloquer le ravitaillement permanent en armes et en mercenaires étrangers qui continuent d’affluer de la Turquie.

    Dans d’autres régions de la Syrie comme l’extrême sud de la province de Deraa également l’armée repousse les djihadistes vers la Jordanie (qui est en train d’abandonner prudemment son attitude hostile envers la Syrie), tandis que la bande frontalière avec la Turquie située au nord de la province de Lataquié (où un avion russe fut traitreusement abattu par un missile turc) est désormais sous le contrôle de l’armée de Bashar el-Assad qui bloque ainsi l’infiltration de nouveaux mercenaires.

    Face à ce revirement majeur dans la guerre syrienne, nos journalistes qui pendant toutes ces années ont refusé de parler de la faim et de la soif des civils piégés à Alep et se sont tus sur les conditions de vie dramatiques qui les ont obligés à quitter la ville et à devenir des réfugiés, changent du tout au tout et parlent maintenant abondamment des civils qui fuient les zones de combat.

    Faisant écho à la propagande et aux requêtes de ces deux criminels que sont le président turc Erdogan et son Premier ministre Davutoğlu – qui sont les principaux responsables du massacre syrien, avec les Saoudiens et les États-Unis -, ils demandent maintenant la « fin des bombardements russes« . Mais cette ferveur pseudo-humanitaire est simplement due au fait que les mercenaires au service du néo-colonialisme et de l’impérialisme occidental et des monarchies obscurantistes du Golfe sont en train de perdre la guerre, et que la Syrie, aidée par la Russie, l’Iran et le Hezbollah libanais, se révèle être un os bien plus coriace que prévu. Quand les peuples résistent vraiment, c’est vrai que « l’impérialisme n’est qu’un tigre de papier« .

    Vincenzo Brandi

    Source : Megachip
    Titre original : « La battaglia per Aleppo e le menzogne dei giornalisti di regime »
    Traduction : Christophe pour ilFattoQuotidiano.fr

    source: http://ilfattoquotidiano.fr/syrie-la-bataille-dalep-et-les-mensonges-de-nos-journalistes-aux-ordres/#.VrvoaNDiWjx

    http://reseauinternational.net/syrie-la-bataille-dalep-et-les-mensonges-de-nos-journalistes-aux-ordres/

     .

    Voir aussi :

    Thierry Meyssan dénonce l’infiltration de l’ONU par les États-Unis et annonce qu’eux et les Russes attaqueront ensemble Daech en Mars 2016

    http://reseauinternational.net/thierry-meyssan-denonce-linfiltration-de-l/

     

     


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    France 2: Pourquoi Pujadas attribue des images de frappes russes en Syrie à la coalition?

    Posted: 11 Feb 2016 08:45 AM PST

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    Une fois n'est pas coutume, lorsque les informations touchent la Russie, la machine politico-médiatique tourne bien. Mais là, nous sommes tombés très très bas, dans les bas-fonds peu fréquentables de la propagande bon marché. Cette fois-ci, France 2 et son journaliste vedette David Pujadas ont franchi la ligne rouge en montrant des images truquées de frappes russes en Syrie contre l'état islamique et en les attribuant à la coalition, dans le 20 h présenté par Julian Bugier ce jour là.
    Ceux qui ont vus le JT de France 2 le 4 février 2016 ont dû être agréablement surpris: contrairement à ces barbares russes qui frappent n'importe où et n'importe comment, massacrant la population civile et les gentils terroristes opposants au passage, les pays civilisés de la coalition américaine, eux, font des frappes chirurgicales, certes moins nombreuses, mais dont la précision remplace la quantité. 
     
    C'est à ce moment du discours que les membres du Parti doivent tous comme un seul homme, se lever, la larme à l'oeil, pour applaudr bien fort.
     
    Voici en substance le message, pas vraiment subtile, diffusé au JT de David Pujadas sur France 2 et présenté ce jour-là par Julian Bugier. Et pour illustrer tout cela, des images évidemments. Mais des images de frappes russes présentées comme portées par la coalition. Or, pour des frappes russes, donc devant tuer un bon millier de civils (chiffre sorti d'un joli chapeau), celles-ci sont extrêmement précises, je dirais même "chirurgicales", bizarre. Pas si barbares ces russes, finalement ... Seulement, pour pouvoir les attribuer à la coalition, les sous-titres en cyrillique ont été gommés, et près netoyage et maquillage, elles furent resservies à nos/vos yeux ébahis d'admiration. Nous sommes forts, quand même? Nous frappons bien! Le bon peuple doit être rassuré. Le bon peuple est rassuré. Les affaires peuvent continuer.
     
    Rien à voir avec les déclarations de Kerry ou de Merkel, demandant instamment à la Russie de cesser les frappes pour protéger la population civile et les gentils terroristes, certainement ceux qui vendent le pétrole à la Turquie ou qui sont formés par des instructeurs payés par le Congrès américain, qui n'a d'ailleurs pas apprécié les résultats et remet en cause le programme de financement de cette "opposition" qui recule devant la Russie et Assad.
     
    A propos des Etats Unis. Il faut rendre à César ce qui est à César: France 2 n'a pas innové. Et, oui, ici aussi, il a fallu copier une technique déjà utilisée outre-Atlantique. Puisque en novembre dernier, la chaîne PBS avait déjà utilisé des images de frappes russes pour les attribuer à l'aviation américaine.
     
    A partir de deux fois, cela n'est plus une erreur, c'est une politique. Toutefois, l'ambassadeur russe à Paris, A. Orlov, déclare à l'agence d'information russe Ria Novosti, qu'il y a peu de chances que la Russie ne donne de suite judiciaire à cette manipulation, car il s'agit avant tout d'un problème éthique. Et ce serait faire trop de publicité à une chaîne qui ne le rémite pas.
     
    Certes, cette position est respectable et force le respect. Mais encore faudrait-il que les responsables de cette "farce" ait une conscience. Toutefois, la manipulation a été volontairement faite, car il a bien fallu "nettoyer" les images. Soit le journaliste vedette D. Pujadas n'était pas courant et l'on peut se demander en fait quel est son rôle. Car il se rapprocherait alors plus d'un perroquet, répétant, sans avoir la possibilité de s'interroger, un texte pré-digéré. Soit il était au courant et c'est une faute professionnelle grave. Dans les deux cas, il n'a plus sa place au JT. A moins, qu'il n'ait exécuté des ordres.
     
    Mais voyons, la France, patrie des droits de l'homme, de la liberté, etc, etc, etc. Serait-il possible que la télévision d'état ne soit devenue qu'un simple instrument de propagande?
     
    Comme disait Coluche:
    "Les journalistes ne croient pas les mensonges des hommes politiques, mais ils les répètent. C'est pire."
    David Pujadas, reporter incontournable, présente le JT de 20H sur France 2 depuis 2001, il est le journaliste des Présidents, de formation à Sciences Po et qualifié de "bagarreur" par certains de ses collègues. Remplacé parfois, pas de chances. Personnellement, il y a quelque chose qui m'échappe. On a envie de demander: tout ça pour ça? Lorsqu'il est devenu journaliste, c'était vraiment pour finir comme ça, comme simple caution propagandiste? Quitter l'Espagne de la dictature dans les années 60 pour la liberté et finalement contribuer à instaurer une dictature de la pensée. Triste destin.
     
     

     


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    Comment France2 nous intoxique (suivi de La peur du Russe)

    Le journal de 20H de samedi 30 janvier a fourni une illustration supplémentaire de la volonté de cette chaîne publique non pas d’informer, mais de manipuler l’opinion. On y était habitué depuis qu’elle s’est spécialisée dans le dénigrement systématique de tous les mouvements sociaux. Mais ses prétendus journalistes ont franchi un cap dans la lecture qu’ils ont donnée de ce qui se passe aux USA.

    Dans une présentation des élections primaires qui vont commencer outre-Atlantique, la présentatrice et le correspondant local de la chaîne ont renvoyé dos-à-dos le démagogue Donald Trump et le socialiste Bernie Sanders au nom de ce qui est présenté comme un même « populisme ».

     Historiquement, il y a toujours eu des acteurs politiques qui remettent en question le système. Ils le font au nom d’une idéologie, affichée ou pas. Ce fut le cas tout au long des 19e et 20e siècles par des socialistes et par des gens d’extrême-droite.

    Mais depuis que la social-démocratie a renoncé à contester le système capitaliste pour adhérer au néo-libéralisme, on dérive en Europe vers un système à l’américaine où deux courants politiques adhèrent totalement au système et se concurrencent uniquement sur l’occupation du pouvoir. L’alternative est limitée à des choix de personnes. Désormais, les contestataires du système, qu’ils se réclament de l’idéal social ou de la tradition nationaliste, qu’ils expriment une analyse critique des inégalités sociales ou qu’ils flattent les passions les plus égoïstes, sont qualifiés invariablement par le prêt à penser dominant de « populistes ».

    Il y a toujours eu, à l’occasion des primaires américaines, des populistes au sens traditionnel de ce terme qui désigne les démagogues flattant avec hystérie les passions les plus basses. Ils se situent le plus souvent à la droite des Républicains. Il y a eu un Barry Goldwater, plus récemment une Sarah Palin, aujourd’hui, c’est Donald Trump. C’est un classique du paysage politique américain.

    La grande nouveauté des prochaines élections présidentielles, c’est l’émergence au sein du parti démocrate, d’un authentique discours de gauche. Après les grands espoirs et les immenses déceptions de la présidence Obama, la candidature de Mme Clinton est apparue davantage comme la perpétuation d’un système inique où les inégalités sociales s’accentuent, où l’emprise des firmes privées sur les choix politiques a atteint des sommets, en dépit de la crise de 2008. Obama a déçu parce qu’on attendait de lui une politique à la Franklin D. Roosevelt, celle du New Deal qui avait encadré le capitalisme après la crise des années trente, au siècle passé. Mais Obama a cédé devant Goldman Sachs. Et les plus faibles ont payé la crise provoquée par la rapacité des plus riches. Et voici que surgit Bernie Sanders, un homme dont tout l’engagement politique, jusque-là marginalisé, a été consacré à promouvoir la justice sociale. Et à la grande surprise des prétendus journalistes, son combat devient celui de millions de ses concitoyens. Un homme qui non seulement dénonce les injustices du capitalisme, mais fournit la démonstration que les valeurs du socialisme ont encore une pertinence.

    Cela, bien entendu, c’est intolérable pour les défenseurs d’un système dont tous les efforts tendent à nous convaincre qu’il n’y a pas d’alternative, que le seul choix que nous ayons encore se limite à des choix de personnes. Il faut donc disqualifier un Bernie Sanders aux USA, un Jeremy Corbyn en Grande-Bretagne. Pour cela un mot : populisme. Une présentation : renvoyer dos-à-dos démagogues de la droite extrême et authentiques candidats de gauche. On a vu cela chez nous, en 2012. On le voit une nouvelle fois à l’occasion des primaires américaines.

    Pourquoi payons-nous encore pour des stations de radio et des chaînes de télévision publiques qui nous intoxiquent au lieu de nous informer honnêtement ?

    rmj

     

    La peur des Rouges ?

    Ça marche plus !

     

    La peur des Rouges ? Ça marche plus !

    Les gouvernements américain et britannique lancent une nouvelle campagne de presse pour diaboliser la Russie, avec de grandes déclarations selon lesquelles le Kremlin infiltre des partis politiques et des médias d’information. L’ignoble but des Russes, nous dit-on, est de détruire l’Union Européenne. 

    Nous avons déjà vu des versions de cette tactique de la peur à propos de l’Ukraine et de Poutine le nouvel Hitler. Mais ce que qu’illustre cet exercice à faire bâiller d’ennui est que le vieux sortilège agité par leurs dirigeants n’agit plus sur le public occidental. L’opium de la propagande occidentale est périmé.

    Peu importe la Russie. L’UE n’a personne d’autre à blâmer sinon elle-même pour ses tensions et difficultés présentes, dues à sa lâche soumission à la politique irresponsable de Washington.

    Vingt-cinq ans après la fin de la Guerre froide et la dissolution de l’Union Soviétique, Washington et son fidèle acolyte de Londres cherchent désespérément à revenir en arrière, au bon vieux temps où ils pouvaient contrôler leur opinion publique avec des histoires cauchemardesques.

    contre-les-valets-de-stalineRappelez-vous ces bons vieux croquemitaines de Rouges sous le lit, la menace rouge, l’Empire du mal, et toute cette sorte de choses, lorsque les autorités occidentales mobilisaient leurs populations par la peur et l’appréhension que «les Russes arrivent» [avec le couteau entre les dents, NdT].

    Si on regarde en arrière aujourd’hui, il semble incroyable que ce lavage de cerveau occidental ait réussi avec de telles tactiques d’épouvante. À l’époque, il fonctionnait très bien. Cela a permis aux États-Unis et à leurs alliés de l’Otan de construire un immense arsenal d’armes nucléaires capables de réduire plusieurs fois la planète en cendres ; cela a permis en particulier aux États-Unis d’intervenir militairement dans des douzaines de pays dans le monde, de renverser leurs gouvernements et d’y imposer des dictatures brutales – sous le prétexte de défendre le monde libre contre les méchants Russes.

    La semaine dernière, nous avons eu un remake de la recette de lavage de cerveau de la Guerre froide. Le Daily Telegraph britannique, un fourrier notoire de la guerre psychologique, a publié un reportage décrivant la Russie et le président Vladimir Poutine comme un spectre malfaisant qui tente de briser l’unité européenne en «finançant des partis politiques» et en tentant une «déstabilisation soutenue par Moscou».

    Le journal, appelé par dérision le Torygraph en raison de ses liens profonds avec l’establishment politique de droite en Grande-Bretagne, citait anonymement des responsables du gouvernement disant :

    «C’est vraiment une nouvelle Guerre froide, là. Juste en face de l’UE, nous voyons une preuve alarmante des efforts russes pour défaire le tissu de l’unité européenne sur toute une série de questions stratégiques vitales.»

    Le même article déclarait que le Congrès américain avait ordonné à James Clapper, le directeur du service de renseignement national étasunien, de «procéder à un examen approfondi du financement clandestin par les Russes des partis européens au cours de ces dix dernières années».

    Les partis politiques européens soupçonnés de prétendues manipulations par les Russes incluent le Parti travailliste britannique sous Jeremy Corbyn, Le Front national dirigé par Marine Le Pen en France, ainsi que d’autres partis aux Pays-Bas, en Hongrie, en Italie, en Autriche et en Grèce, selon le Daily Telegraph.

    Pas une ombre de preuve n’est apportée à l’appui de l’histoire de la supposée conspiration russe pour déstabiliser la politique européenne. Typiques de la vieille propagande occidentale de la Guerre froide déguisée en informations, les accusations portées contre le gouvernement russe reposaient sur des insinuations, des préjugés et la diabolisation. La Russie et son dirigeant Vladimir Poutine sont malfaisants, parce que… eh bien, euh, parce que nous disons qu’ils sont malfaisants.

    Ce qu’il se passe réellement ici est que les coutures de l’Union Européenne craquent à cause du nombre massif de citoyens ordinaires extrêmement déçus de sa monstruosité antidémocratique. Cette désaffection à l’égard de l’UE concerne les électeurs des partis de droite comme de gauche.

    Les politiques économiques d’austérité impitoyables, qui accroissent le chômage et la pauvreté, et les coupes draconiennes dans les services publics – tandis que les banques, les bénéfices des entreprises et une minorité de riches deviennent toujours plus riches – ont aliéné de larges couches de la population parmi les 500 millions de personnes qui composent l’UE.

    Les dirigeants politiques de l’UE, qu’ils s’intitulent conservateurs, libéraux, socialistes ou autre, se sont montrés impuissants à apporter davantage de politiques démocratiques et à répondre aux besoins des gens. Aux yeux de beaucoup d’Européens, les partis politiques établis sont tous les mêmes, tous suivent servilement une forme de bien-être capitaliste au profit des super-riches déjà bien gavés.

    Une grande partie du problème vient de ce que l’Union Européenne n’a manifesté aucune indépendance à l’égard de Washington. Les gouvernements européens, sous le harnais de l’Otan, l’alliance militaire dirigée par les Américains, ont aveuglément rejoint les États-Unis dans leurs guerres désastreuses et illégales pour obtenir des changements de régime en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie. Ces guerres se sont à leur tour retournées contre l’Europe en lui léguant la pire crise des réfugiés depuis la Seconde Guerre Mondiale.

    Aggravant encore la difficulté, il y a l’impasse totalement inutile et futile entre la Russie et l’Europe à propos de la crise en Ukraine. Les agriculteurs, les entreprises et les travailleurs européens souffrent à cause de Washington et de la politique de Bruxelles qui a déstabilisé l’Ukraine afin d’isoler la Russie au profit d’un certain agenda politique. Sur ce point, les gouvernements européens sont particulièrement exécrables, puisqu’il devrait être clair que Washington veut isoler la Russie avec le seul objectif de la remplacer comme fournisseur principal d’énergie du continent. C’est ce qu’on appelle se tirer une balle dans le pied.

    Étant données toutes ces composantes du problème, il n’est pas étonnant que les citoyens européens soient mécontents de ce qu’on appelle leurs dirigeants politiques. Le mépris populaire pour Bruxelles a atteint des niveaux record, et à juste titre.

    La pathétique déférence servile à l’égard des politiques économique et étrangère de Washington se manifeste sous la forme de protestations et de dissidence à l’égard du projet européen dans son entier. La montée de la droite en Pologne, où le parti nationaliste est au pouvoir, est un autre signe des temps.

    Mais plutôt que de se mettre à l’écoute du mécontentement généralisé à travers l’Europe, ce que tentent Washington et ses alliés pro-atlantistes comme la Grande-Bretagne est de faire de la Russie un bouc émissaire.

    L’ironie de la chose est que Washington et Londres cherchent à lui imputer les misères et la désunion croissantes en Europe. Alors que c’est Washington et Londres qui sont les raisons principales pour lesquelles l’Europe part en lambeaux.

    À cette fin, les États-Unis et la Grande-Bretagne relancent les vieilles épithètes de la Guerre froide pour diaboliser la Russie, comme moyen de détourner l’attention de leur propre influence malfaisante et destructrice sur le reste de l’Europe.

    Il y a des décennies, la diffamation antirusse a pu agir sur le public. En particulier lorsque des agences de presse occidentales et leurs journalistes infiltrés par la CIA et le MI6 jouissaient d’un monopole efficace sur l’opinion publique. Mais ces temps sont révolus. Le public occidental n’est plus sous l’emprise des histoires effrayantes comme le seraient de petits enfants. Il y a beaucoup de sources d’information alternatives à leur disposition qui leur permettent de se faire une image plus précise.

    Et cette image précise des problèmes de l’Europe n’a rien à voir avec de prétendus méfaits russes. La malfaisance est plutôt abondamment attribuée à Washington et à ses gouvernements européens laquais.

    La tentative de remake de la peur rouge par Washington et Londres peut facilement être écartée. Mais l’intéressant est que cela manifeste profondément combien ces deux acteurs sont à court d’idées de propagande avec laquelle distraire les populations occidentales de plus en plus inquiètes et en colère.

    Les gens veulent des solutions réelles pour surmonter les problèmes sociaux et économiques, et non d’idiotes histoires à faire peur, périmées depuis des dizaines d’années. Plus l’opinion publique occidentale se sent insultée par un tel non-sens, plus elle méprise ses dirigeants. Les puissances capitalistes occidentales, en déroute et impuissantes, sont dans un cul-de-sac. Allez-y, pointez-vous, on vous attend !

    Finian Cunningham

    Traduit par Diane, vérifié par jj, relu par Diane pour le Saker francophone

    source: http://lesakerfrancophone.fr/la-peur-des-rouges-ca-marche-plus

     

    http://reseauinternational.net/la-peur-des-rouges-ca-marche-plus/

     

     


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